Robertsau III, linogravure sur papier, 42 x 28cm, 2025

Série Fovéa, commencée en 2025 autour des réserves naturelles de la ville de Strasbourg

Il y a quelque chose de l’eau, du reflet, du miroir. Il y a quelque chose à propos de la vision périphérique, de ce que je vois avant que la fovéa, la partie centrale de l’œil, ne fasse place nette et ne me montre ce qui est. Un moment de doute et de renversement, où l’ondulation des arbres dans l’eau devient un ensemble de possibles. Où je vois des fantômes et des mirages. 

J’aperçois ces lieux à mirages en courant, en promenade, lorsque mon attention est vive et que mes sens sont en éveil. Alors, je m’arrête devant ces lumières qui s’échappent et je prends une photographie, avec mon téléphone portable. La photographie fige ces lieux, ces moments, c’est une fovéa absolue, elle rend net, elle retire l’indétermination. 

De retour à l’atelier, je replonge dans l’image. Je l’agrandis, je la dessine, je la noircis, je cherche à retrouver cet espace liminal, périphérique, indéterminé. Retrouver le chatoiement, la possibilité d’une vision double ou plurielle : entre ce qui est visible, l’eau elle-même, ce qui se reflète dans l’eau, ce qui est sous l’eau et qui transparaît, ce qui sort de l’eau. Je transfère le dessin sur une plaque de linoléum que je grave. Je creuse la plaque à la recherche des lumières. Chaque retrait est un peu de blanc qui s’ajoute.

La fovéa, parce que cette série s’éloigne du besoin constant de rendre net. Elle montre ce qui s’efface, ce qui fuit, ces miroitements mouvants. Je cherche à dessiner du point de vue du périphérique, à dessiner un mouvement, un reflet, une branche qui bruisse dans le vent, le courant d’un giessen entre les méandres d’un arbre noyé.

L’arbre noyé est un vaisseau, il est en dessous et au deçà de l’eau. Il fait passage entre les mondes, son corps est en même temps sous l’eau, hors de l’eau et reflété dans l’eau.

Souvent, je pars peindre ces arbres, ces moments aux points